L'habitation dans l'Union soviétique

Français > Contexte > Économique > Problème de l'habitation

Dans le chapitre 18 du Maître et Marguerite, nous pouvons lire comment Maximilian Andreïevitch Poplavski, l'oncle de Berlioz vivant à Kyïv, vient à Moscou pour réclamer le logement de son neveu. C'était un scénario courant pendant la période soviétique, puisque l'obtention d'un appartement à Moscou était considérée comme une grande victoire. Moscou avait des biens qui ne pouvaient être trouvés nulle part ailleurs. Cependant, l'obtention d'une прописка [propiska] - un enregistrement ou un permis d'y vivre, n'était pas facile, comme Poplavski le comprendrait vite.


La collectivisation de l'espace de vie

La propriété privée de maisons a été abolie dans l'Union soviétique en 1918. De nouvelles lois sont entrées en vigueur en stipulant qui pourrait vivre où. La situation a été particulièrement compliquée dans les villes, où les propriétaires fonciers ont fui et beaucoup de personnes ont voulu déménagers vers les villes. Le crissement d'habitation s'ensuivant a encore ses conséquences jusqu'à ce jour. Des autorités d'habitation ont été mises sur pied pour déterminer qui devrait vivre où. La plupart des maisons divisées en appartements avaient un Comité d'Habitation avec un président. Un exemple très vivant de comment cela fonctionnait peut être vu dans le film Docteur Jivago (1965), réalisé par David Lean et basé sur le roman réputé de Boris Pasternak.

Cliquez ici pour regarder un fragment du Docteur Jivago


Un autre film qui décrit ce problème de manière percutante est Est [Ouest] (1999) réalisé par Régis Wargnier.

Cliquez ici pour regarder un fragment de [Est] Ouest


N'importe quel appartement jugé trop grand pour son propriétaire, s'il avait la chance de pouvoir y rester rester, était partagé avec n'importe qui était autorisé par le Comité d'Habitation pour emménager. Très souvent des grands appartements et des maisons privées ont été remodelés dans plusieurs plus petits appartements. D'autres appartements ont été simplement partagés. Par exemple, un appartement de trois pièces qui a appartenu à une famille pouvait devenir un appartement de trois pièces pour trois familles. La cuisine, le hall et la salle de bains étaient partagés. Souvent il y aurait des ressentiments entre les différentes familles vivant dans une коммунальная квартира (kommounalnaïa kvartira) ou un appartement communal, surtout si une des familles était le propriétaire original et surtout si les familles ont continué à vivre ensemble pendant des années.

La réaction soviétique typique à cette situation était d'inventer des projets intelligents pour contourner les règlements officiels. L'échange d'appartements était une possibilité. Si, par exemple, deux personnes se sont mariées, ils pourraient vouloir échanger leurs deux appartements d'une chambre pour un appartement de deux chambres. La manière la plus simple pourrait être de trouver un autre couple qui divorçait et changer avec eux. Évidemment, tout cela devrait être approuvé par les Comités d'Habitation de chaque maison. D'habitude la situation était plus compliquée: souvent une troisième ou quatrième famille devrait être impliquée. Les injustices du point de vue de la grandeur et de la qualité de l'appartement et de la désirabilité du quartier devraient être regardés aussi. Quelquefois certains partis pourraient être congédiés d'une certaine façon pour accepter une situation de vie moins désirable. Un autre truc était de diviser un appartement avec de grandes chambres dans de plus petites chambres, qui pourraient le rendre plus désirable, au moins sur papier. De telles machinations ont existées jusqu'aux derniers jours de l'Union soviétique.


La nouvelle politique économique

En 1921, de petites maisons ont été rendues à leurs anciens propriétaires. Mais le terrain était nationalisé, donc les propriétaires de petites maisons ont gardé seulement la possession des bâtiments, et il pouvaient utiliser le terrain sans en être le propriétaire. Le droit de propriété était limité à l'utilisation personnelle de l'ancien propriétaire et de sa famille. Pendant la période de la Nouvelle Politique économique (NPE) on a permis aux personnes privées de construire et posséder de petites maisons.

En 1936, l'article 6 de la Constitution d'USSR stipulait: «Le terrain, ses dépôts naturels, les eaux, les forêts, les moulins, les usines, les mines, les chemins de fer, le transport d'eau et aérien, les banques, le poste, le télégraphe et les téléphones, les grandes entreprises agricoles organisées par l'état (les fermes publiques, les entrepôts de machines et de tracteurs et d'autres de ce genre) aussi bien que les entreprises municipales et la totalité des habitations dans les villes et les localités industrielles, sont la propriété publique, c'est-à-dire appartiennent au peuple entier».

Bien que l'article 10 de cette même Constitution stipulait que «le droit des citoyens à la propriété personnelle des revenus de leur travail et de leurs économies, de leurs habitations familiales et des économies auxiliaires du ménage, leurs meubles et ustensiles et articles pour l'usage et le confort personnel, aussi bien que le droit de succession de possessions personnelles des citoyens, sont protégés conformément à la loi.»

Quand même, dans les yeux du gouvernement et du parti, la maison privée est toujours restée une concession, un mal qui devrait être éliminé aussitôt que possible.


Justice sociale

En 1939, après avoir confisqué presque toutes les fermes privées, le gouvernement soviétique, par un contraste étrange, a adopté la politique d'encourager les individus d'voir leurs propres maisons. Mais seulement un tout petit nombre, particulièrement la nomenclature du parti et ceux près du pouvoir, pourraient rêver d'une habitation décente de haute qualité.

Le principe de la justice sociale, comme il a été compris dans l'USSR, déclara que chaque famille avait le droit d'une habitation de pas moins de 5 mètres carrés d'espace pour vivre par personne. Par exemple, si une famille de trois personnes avait une chambre de 15 mètres carrée dans une коммунальная квартира [kommounalnaïa kvartira] ou appartement communal, c'était considéré être assez pour eux. Mais si la chambre avait seulement 14 mètres carrés, ils avaient le droit d'améliorer leurs conditions de vie et leur nom était inclu dans une liste d'attente pour un nouvel appartement, accordé par l'État. On appelait ces gens des Очередники [otcheredniki]. Un otcheredniki devait attendre pendant plusieurs années -à Moscou et à Léningrad cela pourrait facilement être 10 ans ou même plus.

Dans ce temps presque toutes les habitations dans les villes étaient dans les mains de l'état. L'état était responsable pour la gestion, l'entretien el la construction des maisons. Mais malgré l'augmentation du noimbre de constructions, il y avait un manque de logements permanent, les listes d'attente devenaient plus longues et les actes arbitraires et la corruption des fonctionnaires étaient tristement célèbres.

Ceux qui avaient la chance de recevoir un appartement séparé ne devenaient ni propriétaire, ni locataire, mais occupant, ils n'avaient aucun bail de location, mais seulement la permission d'occuper l'appartement - une прописка [propiska]. Tous les droits d'habitation étaient fixés dans le Code d'Habitation. Les occupants n'étaient pas censés payer de loyer, ils devaient seulement payer pour les utilités, qui étaient limitées et contrôlées par l'État. Le système d'habitation était un système non commercial dans l'économie soviétique et les tarifs utilitaires étaient loin des dépenses réelles. Jusqu'aux années quatre-vingt-dix les résidents ont payé pas plus de 10 % du prix réel. Le reste était la responsabilité de l'État. Ce n'était donc pas trop étonnant que l'insuffisance financière permanente a provoqué que le stock d'habitations, les systèmes de construction et l'infrastructure se délabraient. Des paiements non adéquats pour les ressources ont provoqué le gaspillage irresponsable d'eau, d'électricité et de gaz.


L'habitation dans la Fédération russe

Le Perestroika a ouvert de nouvelles opportunités pour la dénationalisation et les réformes du marché dans toutes les régions de l'économie russe. Au début des années quatre-vingt-dix cette réforme a aussi atteint le marché d'habitation. En 1992 la Loi Fédérale de Privatisation des Habitations a confirmé aux locataires privés la propriété des appartements qu'ils occupaient. Les habitations ont été transférées gratuitement à tous ceux qui l'ont voulu. Mais seulement une fois et seulement selon les termes de leur propiska. Évidemment, on a donné les appartements les plus chers à la nomenclature et aux riches, qui avaient de meilleures opportunités dans le système soviétique. Autrement dit: la privatisation des habitations a légalisé l'ancien système de distribution soviétique et a augmenté l'abysse entre les riches et les pauvres.

En application de la Loi de Privatisation des Habitations presque 50 % du stock d'habitation national a été privatisé. C'était une des actions politiques les plus significatives du nouveau Gouvernement russe. La Russie, à 71 %, a maintenant un taux de propriété de familles plus élevé que les Etats-Unis (68 %), le Royaume-Uni (69 %), le Canada (66 %) ou la Belgique (65 %).

Mais cette privatisation n'a pas eu les conséquences économiques attendues. La majorité des nouveaux propriétaires d'appartements avait de nouveaux droits (pour vendre, donner, hériter), mais ils n'étaient pas prêts à diriger leur propriété, ni à payer pour l'entretien. Les autorités ont été obligés à continuer à subventionner l'habitation, en limitant les tarifs des utilités et en soutenant ainsi des résidents tant pauvres que riches. En plus, un système de subventions personnelles pour les pauvres a été développé: une famille ne devrait pas payer plus de 18 % du revenu mensuel pour leurs dépenses d'habitation. Le reste est au frais de l'État. Ce fardeau financier est lourd pour les budgets locaux. Le soutien de l'habitation cause une insuffisance significative dans les budgets (en 2000 cette insuffisance s'élevait à 59 milliards de roubles). La conséquence de cette politique est une tendance continue à la déstabilisation et une intégrité diminuante de l'infrastructure d'habitation.

Avec la privatisation d'habitation, d'anciennes compagnies publiques sont devenues des entreprises privées de gestion et de construction. L'état et les autorités locales ne construisent plus d'habitations. Des compagnies privées d'investissement et de construction ont repris de ce secteur.



Partager cette page |