Le professeur Kouzmine

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Contexte

Le professeur Kouzmine est le docteur à qui Andreï Fokitch Sokov, le buffetier du théâtre des Variétés, se rend après avoir entendu dire chez Woland qu'il allait mourir d'un cancer.

Dans le chapitre 18 du Maître et Marguerite Boulgakov décrit que Kouzmine «demeurait exactement de l’autre côté de la cour, dans une petite maison blanche». C'était la maison à Bolchaïa Sadovaïa n° 5, où a vécu Ielena Sergueïevna Chilovskaïa (1893-1970), la troisième épouse de Boulgakov. Ce bâtiment a ensuite été démoli pour faire place à l'hôtel Pekin, l'un des plus grands hôtels de Moscou.


Prototype

Boulgakov a dérivé le nom de Kouzmine du professeur Vasili Ivanovitch Kouzmine (1851-1928), un chirurgien russe et professeur aux universités de Moscou et de Kazan qui, à la fin de sa carrière, a ouvert un cabinet privé à Sadovaya Koudrinskaïa n° 29, près de l'étang du Patriarche. Beaucoup de sources le voient comme le véritable prototype du professeur dans Le Maître et Marguerite, et le présentent comme «l'un des médecins qui ont traité Boulgakov lui-même dans les années 1930». Mais ça, ce n'est pas possible, parce que Vasili Ivanovitch Kouzmine était déjà mort dix ans plus tôt.

Le vrai prototype du Kouzmine dans le roman était le professeur Miron Semionovitch Vovsi (1897-1960), un spécialiste des maladies rénales et pulmonaires. En septembre 1939, Boulgakov perdit la vue lors d'un voyage à Leningrad. Comme il était un médecin lui-même, il a réalisé immédiatement que cela pouvait être un symptôme de la néphrosclérose, la maladie ayant entrainé la mort de son père. Le 15 septembre 1939, il a appellé son ami et médecin Andreï Andreïevich Arendt (1890-1965), le fondateur de la neurochirurgie pour enfants en Union soviétique. Arendt l'a mis en contact avec le neuropathologue Mikhaïl Yulevitch Rapoport (1891-1967), qui renvoya Boulgakov à Miron Vovsi. Ce dernier l'a examiné le 17 septembre 1939.

Vovsi avait obtenu son diplôme de médecin en 1919 à la Faculté de médecine de l'Université de l'État de Moscou. Il était connu pour ne pas toujours être attentif à l'éthique médicale, surtout en exprimant son diagnostic. Il a immédiatement dit à Ielena Sergueïevna que Boulgakov mourrait dans les trois jours. Boulgakov mourra seulement sept mois plus tard, mais il n'arrêtait pas de penser à sa rencontre avec Vovsi, et le 15 janvier 1940, il a dicté la scène du buffetier du théâtre des Variétés et sa rencontre avec le professeur Kouzmine à sa femme Ielena Sergueïevna.

Plus tard, Miron Semionovitch Vovsi est devenu un médecin de renom qui a traité beaucoup de hautes autorités et d'officiers dans le Kremlin. Avec des centaines d'autres médecins, il fut arrêté en janvier 1953 dans la soi-disant Conspiration des médecins, quand Joseph Vissarionovitch Staline (1878-1953) soupçonna une conspiration sioniste de médecins contre les dirigeants soviétiques. Avec le médecin personnel de Staline, le docteur Vladimir Nikititch Vinogradov (1882-1964), Vovsi était considéré comme l'une des principales figures de la conspiration. Le 4 avril 1953, un mois après la mort de Joseph Staline, il fut officiellement annoncé que les médecins étaient innocents, et le soir même, Vovsi fut relâché.

On dit que le jour où il a été libéré, le docteur Vovsi a donné une conférence à l'Institut de formation médicale continue avant de rentrer à la maison, et qu'il a eu une standing ovation.


Prédiction

Dans une lettre écrite le 5 janvier 1961 par Ielena Sergueïevna à Nikolaï Afanasievitch Boulgakov (1898-1966), le frère cadet de l'écrivain, elle lui dit que Boulgakov avait déjà fait une prédiction en 1932 sur sa propre mort. «Il a dit que cela arriverait en 1939», a-t-elle écrit. Comme le docteur Vosvi, il s'était trompé de sept mois.



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